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CAMPAGNES SOLIDAIRES
22.10.2015

Une petite ferme mise en péril par la nouvelle Pac

Laetitia Izard est paysanne dans les Alpes-de-Haute-Provence, en Gaec* avec son mari. Sa petite ferme de montagne pourrait perdre le quart de ces aides Pac en 2015, avec l'application des nouvelles règles de calcul des surfaces éligibles et le plancher du nombre d'animaux pour la PMTVA*.

Laetitia Izard est jeune paysanne en zone de montagne, dans le nord des Alpes-de-Haute-Provence. Son mari s'est d'abord installé seul en 2009 ; elle l'a rejoint deux ans plus tard sur la ferme.

« Nous élevons un petit troupeau de vaches allaitantes  - sept mères et un taureau – et 200 poules pondeuses, précise-t-elle. En complément, nous avons récupéré un vieux verger de pommiers ; avec ces arbres et les fruitiers de plein vent poussant dans les pâtures, nous produisons du jus de fruit.

Notre exploitation couvre une cinquantaine d'hectares, en location pour la plus grande partie ; nous ne sommes propriétaires que de 5 000 m2.

Jusqu'à l'an dernier, avec l'ancienne Pac, je déclarais 50 hectares primables. Nous touchions 1344 euros de prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes (PMTVA*) et 13 144 euros d'indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN*), en complément de nos DPU* (droits à paiement unique), 2682 euros en 2014. »

Avec la mise en oeuvre de la nouvelle Pac, les surfaces primables fondent : « Je me suis bien embêtée au printemps, à partir de la photo satellite fournie par l'administration, à calculer les surfaces donnant droits aux aides, en essayant d'enlever tous ce qui n'était pas admissible, notamment ce qui est considéré comme végétation non comestible. Nous avons beaucoup de landes, couvertes de genêts et d'autres arbustes, et une parcelle de sous-bois pentue où nos vaches ne vont plus pâturer : on passe de 50 à une vingtaine d'hectares ouvrant droit aux aides Pac. » Calculées en fonction de ces surfaces, l'ICHN* va donc fortement baisser, même si la prime de base augmente avec la nouvelle Pac : l'exploitation devrait perdre dans les 3 000 euros chaque année.

« Comme nous avons moins de dix vaches, plancher désormais adopté dans la Pac, nous ne recevrons plus de PMTVA*, complète Laetitia. On a bien réfléchi à passer à dix vaches, mais nous n'avons pas la surface pour cela, et sachant que nous ne sommes pas complètement autonomes pour l'alimentation de nos bêtes – encore moins en cette année de sécheresse – nous aurions dû augmenter les achats de foin. C'est impossible au vu de nos charges fixes, dont un loyer de fermage assez élevé (1). »

Quant aux DPU* devenus DPB (2), leur taux unitaires devrait augmenter. En 2015, la ferme percevrait alors à ce niveau environ 3000 euros, 300 euros de moins qu'en 2014. Avec la progression de ces aides d'ici 2019, dans le cadre du mécanisme dit de convergence des aides, la ferme percevrait près de 5000 euros en 2019.

Pour Caroline Collin, animatrice nationale de la Confédération paysanne en charge de la Pac : « Le problème, c'est que la ferme est petite. Elle est pénalisée par la baisse de l'ICHN*. Elle n'a pas comme d'autres exploitations de montagne de grandes surfaces de parcours extensifs. Le fait de ne pouvoir déclarer qu'une vingtaine d'hectares éligibles la handicape fortement. D'après nos calculs, avec la nouvelle Pac, elle devrait perdre tout compris environ 4000 euros d'aides publiques en 2015, et même avec le mécanisme de convergence, elle perdrait encore près de 2000 euros en 2019 par rapport à 2014 ».

« C'est un mauvais coup, confie Laetitia. Je réfléchis à reprendre un boulot à l'extérieur. Le gaec serait alors dissous, ça réduirait les charges. On réfléchit aussi avec d'autres éleveurs de volailles bio du coin à faire ensemble notre aliment fermier (3), afin de diminuer l'achat d'aliment bio, actuellement très cher. Mais on n'est pas sûr du tout que ça suffise. Ça fait deux ans que nous demandons à la banque des avances de trésorerie avant la perception des aides Pac. On n'a pas beaucoup de remboursement d'emprunt, mais si nos aides baissent comme ça, on ne passera pas. 4000 euros pour une petite ferme, ce n'est pas rien. Et pour faire bonne mesure, on va être contrôlés par l'administration et si je me suis trompée dans ma déclaration, on devra payer une amende... »


Propos recueillis par Benoît Ducasse

 

(1) 3258 euros par an
(2) Droits de paiement de base
(3) A
vec l'aide des vétérinaires du GIE Zone Verte.

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